Ils se remirent à marcher en silence. Mais le silence tissait entre eux des fils de soie multicolores. Au bout d’un moment, il reprit la parole.
- Il faut pardonner avant qu’il ne soit trop tard. Avant que la mort ne tranche.
- Moi je n’ai rien à pardonner. Personne ne m’a fait de mal.
- C’est ça qui est le plus difficile. Il faut aussi pardonner ce dont on n’est pas encore conscient.
- Mais c’est impossible !
- Tu crois cela parce que tu n’as pas accès au véritable Pardon. Tu te comportes comme si pardonner était un geste. Comme si pardonner c’était effacer à la gomme une ligne mal écrite. Pardonner c’est une ouverture d’âme. Pardonner c’est permettre à la ligne de s’écrire quand même et par avance, l’accueillir avec ses fautes et ses imperfections parce qu’elle contient tous les possibles. Tu comprends ?
- Je crois. Mais je ne sais pas faire cela.
- Bien sûr que si ! Que se passe-t-il quand tu juges par avance les mots que tu vas écrire ?
- Je sais : je n’écris rien du tout ! Je sèche…
- Exactement ! Et plus tu pardonnes d’avance ce que ta plume porte en germe, plus ta plume s’envole !
- Et c’est là que j’aime ce que j’écris !
- Pas tout à fait : c’est quand tu aimes ce que tu écris avant de l’avoir écrit que ton écriture peut déployer son plein potentiel.
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